
Les marchés clôturent globalement en hausse une semaine contrastée, caractérisée par une accalmie entre Trump et Xi Jinping et une exacerbation des tensions entre Trump et Musk.
Une ambiance propice à un nouveau point sur les infrastructures électriques, à la lumière (😳) d’un excellent article du MIT sur la consommation des IA.
Macro 🔭
Aux Etats-Unis, l’emploi est au cœur des publications de la semaine, avec des ouvertures de postes (enquête JOLTS) supérieures aux attentes, des licenciements (Challenger) à un plus-bas de quatre mois, puis en fin de semaine les données moins favorables des inscriptions hebdomadaires au chômage, qui s’inscrivent de nouveau à la hausse, et la statistique d’emploi non agricole de mai qui confirme un ralentissement très graduel du marché du travail. L’indice RealClearMarkets/TIPP d’optimisme économique affiche un rebond surprise en juin mais reste dans la zone de pessimisme (moins de 50) qu’il n’a pas quittée depuis bientôt quatre ans. Le PMI composite S&P de mai est revu à la hausse en dernière lecture, bref, une semaine plutôt positive en dehors du psychodrame Trump Musk, qui se solde par une reculade d’Elon après la flambée d’invectives qui lui a fait perdre la bagatelle de 34 Md$. Brooos please nooo vs champion mon frère, #whereistheadultintheroom ? En attendant, le World Travel & Tourism Council estime à 12,5 Md$ les pertes de revenus liés au tourisme aux Etats-Unis cette année. Ce qui va alourdir le déficit commercial que Trump cherche à résorber.
Dans la zone €, l’inflation de mai ressort en ralentissement sensible à 1,9%, grâce à un repli marqué de l’inflation dans les services. La BCE baisse ses taux directeurs de 25 points de base et annonce une pause dans l’assouplissement monétaire. Le taux de chômage baisse (6,2%), la croissance des ventes au détail accélère, et la dernière estimation de croissance du PIB révèle une bonne surprise : +1,5% annualisé contre +1,2% en première estimation. Le PMI de la construction, en revanche, se contracte encore, notamment en raison d’une dégradation en France et en Allemagne.
Au Japon, les dépenses des ménages fléchissent après le fort rebond de mars. L’indicateur économique avancé pour avril déçoit également.
En Chine, le PMI manufacturier passe en territoire de contraction (48,3), le PMI des services s’améliore, mais pas assez pour que le composite reste en zone d’expansion. La PBOC injecte des liquidités, et les négociations avec les Etats-Unis reprennent, même si on hésite à qualifier l’échange entre Xi Jinping et Trump d’avancée dans la guerre commerciale compte tenu de la volatilité des convictions du second.
L’OCDE revoit à la baisse ses prévisions de croissance mondiale de 0,2%, à 2,9% en 2025 en raison des « augmentations substantielles des barrières au commerce, de conditions financières plus restrictives, et d’un affaiblissement du sentiment des entreprises et des consommateurs ». Une fois n’est pas coutume (et on n’est pas désolé), ce sont les Etats-Unis qui affichent la plus forte révision, à -0,6%, pour 1,6% de croissance. Ils sont suivis par le Japon, dont la croissance est désormais attendue à 0,7% (-0,4%), ce qui pour le coup me désole car j’ai un biais positif sur les actions, et la Chine (4,7%, seulement 0,1% de moins que dans les prévisions de mars). La zone € reste à 1%. The joke’s on you 😝, ou l’arroseur arrosé.
Selon le World Wealth Report de Cap Gemini, le nombre de millionnaire a crû de 7,6% aux Etats-Unis en 2024, baissé de 2,1% en Europe.
Micro 🔬
Début mai, un journaliste du FT a lancé un nouvel acronyme : le TACO trade consiste à acheter des actions après chaque annonce spectaculaire de Trump sur les droits de douane parce que Trump Always Chickens Out (Trump se dégonfle toujours, le principal intéressé n’apprécie pas). Cette semaine, on inaugure le MACO trade : à moins 150 Md$ de capitalisation boursière pour Tesla, Elon admet qu’il faudrait calmer le jeu. Par ailleurs, la baisse des ventes de Tesla se poursuit en mai un peu partout en Europe selon les premiers chiffres disponibles : -36% en Allemagne (dans un marché du véhicule électrique en hausse de 45%), -20% en Italie.
Au moins trente sociétés cotées au Etats-Unis ont adopté la stratégie de Strategy (pun not intended) : lever des capitaux pour acheter du bitcoin. Le business model le plus bête du monde, c’est l’époque qui veut ça.
Microsoft annonce une nouvelle vague de licenciements, un mois après la dernière. Les licenciements dans la tech repartent à la hausse mais restent encore très loin du pic atteint début 2023 (à suivre ici).
Meta annonce un accord sur 20 ans avec Constellation Energy à partir de 2027 pour la fourniture d’énergie nucléaire.
Le titre de la marque culte de vêtements de yoga lululemon perd près de 20% lors de sa publication trimestrielle. La société revoit à la baisse ses objectifs, avertissant que les consommateurs sont prudents et qu’elle va devoir augmenter ses prix pour compenser la hausse des droits de douane.
Même performance pour le titre Docusign le jour de sa publication, satisfaisante mais assortie d’un avertissement sur la facturation annuelle en raison de sa transition vers un système piloté par l’IA.
Rheinmetall remplace Kering dans l’Euro Stoxx 50. Symboliquement, ce n’est pas la meilleure nouvelle de la semaine.
Sanofi, toujours plus riche de cash que d’idées, annonce l’acquisition de la société d’immunothérapie Blueprint Medicines pour 9,5 Md$.
La minute innovation 🧚🏻
Amazon développe des robots humanoïdes pour livrer ses paquets.
Meta compte lancer en 2026 une IA qui crée des publicités personnalisées pour Instagram et Facebook à partir de l’image d’un produit.
J’ai créé cette vidéo sur Geo3 (Gemini Pro). Vous trouverez à peu près la même sur Bing, le moteur de recherche de Microsoft, qui propose désormais Sora gratuitement. Une chance d’augmenter enfin ses 4% de part de marché ? N’en abusez pas, la dépense énergétique équivaut à une heure de micro-onde (cf paragraphe final).
Ambiance électrique🔌
Je serai à court de titres sur ce thème avant la fin du mandat de Trump, et encore plus certainement avant la remise en état du réseau électrique mondial, évoquée récemment ici (Haute tension).
Nous avons donc déjà abordé la question des besoins en énergie liés aux nouveaux usages, des véhicules électriques à l’intelligence artificielle, mais y revenons aujourd’hui, à la lumière d’un article passionnant de la MIT Technology Review, et des enseignements graduellement tirés du récent blackout espagnol. C’est que dans trois ans, l’IA pourrait consommer autant d’électricité que 20% des ménages américains. Et que l’énergie qu’elle consomme est plutôt plus sale que la moyenne.
A l’explosion attendue de la demande d’électricité (30% du mix en 2023 en scénario Net Zéro contre 20% actuellement, dans le cadre d’une demande en croissance de 3-4%) se superpose le défi posé par les renouvelables à la stabilité et à la fiabilité des réseaux électriques. Contrairement aux centrales à combustibles fossiles ou nucléaires traditionnelles, les énergies renouvelables sont par nature intermittentes et ne fournissent pas d’inertie mécanique. Ce manque d’inertie (une propriété naturelle des turbines en rotation) rend les réseaux plus sensibles aux fluctuations de fréquence et moins aptes à absorber les déséquilibres soudains. Ajoutez des processus de connexion de réseaux inefficaces et des infrastructures obsolètes et vous obtenez selon toute probabilité le blackout espagnol : baisse soudaine de la production d’une centrale solaire, puis d’autres sources renouvelables, à un moment où elles assurent 75% de la production, et tout le système lâche.
Il y a une décennie, les investissements dans les combustibles fossiles étaient 30 % plus élevés que ceux dans la production, les réseaux et le stockage d’électricité ; en 2025, les investissements dans l’électricité devraient être supérieurs de 50 % au total des dépenses consacrées à la mise sur le marché du pétrole, du gaz naturel et du charbon. Selon l’Agence Internationale de l’Energie, plus de 3 Md$ d’investissements dans la production d’énergie (aux deux tiers dans les renouvelables) sont prévus en 2025, moins de 400 M$ dans les réseaux. Or celui-ci doit atteindre la parité avec les dépenses de production d’ici le début des années 2030 pour maintenir la sécurité électrique. Cette composante du thème des infrastructures devrait donc rester porteuse.
Cet article ne constitue pas une recommandation d’investissement sur les thèmes ou les titres mentionnés.