Semaine en dents de scie : l’économie américaine se porte insolemment bien, ailleurs ça va un peu mieux, mais la Fed souffle le chaud et le froid et le risque géopolitique revient sur le devant de la scène.
Bob (Iger) remporte haut la main le soutien des actionnaires de Disney : 1- 0 contre les activistes. Qui sont-ils et quelle est leur performance ?
Macro 🔭
Aux Etats-Unis, le rapport d’emploi ADP montre une augmentation du nombre de postes supérieure de 20% aux attentes et de 30% au chiffre de février. Les nouvelles demandes d’allocations chômage remontent un peu (221 000), mais les créations d’emplois non agricoles augmentent significativement (303 000) et le taux de chômage baisse à 3,8%. Jerome Powell maintient que la Fed attendra pour agir que l’inflation soit fermement ancrée sur une trajectoire à 2%, mais également que les récentes données (pointant vers une remontée de l’inflation) ne changent pas matériellement la vision d’ensemble, et qu’il sera approprié de baisser les taux dans le courant de l’année. De nombreux gouverneurs de la Fed s’expriment, dont Loretta Mester et Mary Daly (« 3 baisses cette année, pas d’urgence »), Neel Kashkari, non votant (« possible qu’il n’y ait pas de baisse cette année ») et Thomas Barkin (« patience »). Je mentionnais la semaine dernière l’inquiétude du CEO de Blackrock au sujet du financement des retraites américaines. Selon une étude de Northwestern Mutual citée par Bloomberg, les Américains estiment qu’il leur faut 1,5 M$ pour partir confortablement en retraite. C’est 50% de plus que pendant la pandémie, et 17 fois plus que ce que l’épargnant moyen a mis de côté pour l’échéance (88 400$).
A 46,1, le PMI manufacturier final de la zone € pour mars est en baisse par rapport au mois précédent mais un peu meilleur qu’en première estimation. La Grèce, l’Espagne et l’Italie surperforment la zone. Le PMI composite (biens et services) final retrouve la zone d’expansion (50,3). L’inflation ressort à 2,4% en mars par rapport à mars 2023 ; c’était 2,6% en février. Le taux de chômage repasse à 6,5% (après 6,6% en février).
Le PMI manufacturier britannique repasse en territoire d’expansion. Kemble, la holding de Thames Water (services collectifs), fait défaut sur ses obligations 2026. La gestion de l’eau, un thème porteur (sélectivement).
L’indice Tankan des services au Japon continue de progresser, et le JPY rebondit après un commentaire de Kazuo Ueda suggérant une nouvelle hausse des taux de la BOJ au deuxième semestre.
Le PMI mondial repasse au-dessus de 50. Parmi les grandes régions, seule l’Europe est au-dessous.
Enfin, l’or poursuit son rebond et le pétrole retrouve un plus-haut de 21 mois (WTI) en raison de la flambée des tensions au Moyen-Orient et de la reprise de la demande en Chine.
Micro 🔬
Tesla publie des livraisons de 386 810 véhicules au premier trimestre, très au-dessous du consensus de marché (457 000). Si vous préférez le produit au titre, Sotheby’s met en vente le Cyberbeast, 50 miles au compteur, fin des enchères le 9 avril.
Les livraisons de Rivian sont quant à elles supérieures aux attentes (récemment révisées à la baisse comme dans tout l’univers du véhicule électrique), de même que celles des Chinois Li Auto (environ 80 000 livraisons, +53%), Nio, et Xpeng, tandis que le lancement du SU7 de Xiaomi (vraiment pas mal) attire 88 898 pré-commandes pendant les premières 24 heures, poussant d’après les rumeurs la société à demander à ses fournisseurs d’augmenter leur capacité de production pour fournir une demande de 10 000 véhicules par mois. Petit doute de l’auteur sur les précommandes de 88 898, peut-être aussi fiables que les indicateurs économiques officiels chinois : ça fait beaucoup de 8 quand même (chiffre de la chance et de la réussite en Chine).
Le tremblement de terre à Taiwan affecte les chaînes logistiques des semiconducteurs, dont certains suspendent leurs négociations prix avec leurs clients, mais la production reprend dans la semaine. TSMC détient 60% du marché des fonderies de semiconducteurs.
Samsung Electronics, numéro 2 du même marché avec environ 11% de la fabrication mondiale, affiche un résultat opérationnel préliminaire en hausse de 931% au premier trimestre grâce à la hausse des prix des DRAM, dont il est le leader mondial, et au succès du Galaxy S24.
Intel, qui ne fait pas partie du top 10, ambitionne de remplacer Samsung chez les fondeurs d’ici 2030. Pour l’heure, son titre perd 8% à l’annonce des résultats de cette activité, non communiqués jusqu’ici, à savoir une perte de 7Md$ en 2023, pour un chiffre d’affaires de 19 Md$. L’équilibre est projeté mi 2027. Ses investissements dans un secteur stratégique lui ont heureusement valu 20 Md$ de subventions annoncées le mois dernier.
Alphabet envisagerait l’acquisition de Hubspot, découvreur de l’inbound marketing et fabricant de logiciels pour la gestion de la relation client et le marketing, notamment sur les réseaux sociaux, qui capitalise près de 35 Md$.
Johnson & Johnson annonce l’acquisition de Shockwave (traitement des calcifications artérielles) pour 13 Md$.
Selon Bloomberg, Apple s’intéresse toujours à la robotique, axe de développement engagé en même temps que les véhicules électriques que la société vient d’abandonner. La société travaillerait sur des robots qui suivent leur maître dans la maison, et sur un appareil de table qui suivrait les mouvements de la tête pour une meilleure expérience en visio. Pas très magique à première vue.
Les données de 73 millions de clients (actuels et passés) d’AT&T ont atterri sur le dark web.
Le titre Trump Media & Technology perd cette semaine quasiment tout le terrain gagné depuis l’IPO. En annonçant des pertes de 58 M$ en 2023, sur un chiffre d’affaires de 4 M$, la société précise avoir identifié des « faiblesses matérielles dans le contrôle interne sur le reporting financier quand les chiffres à fin septembre ont été préparés ».
Paramount Global (CBS, MTV) entre en discussions exclusives avec Skydance, la préférant à la proposition d’Apollo (26 Md$).
Le dernier fonds de private equity de Tiger Global a levé 2,2 Md$, alors qu’il en cherchait 6.
La minute innovation 🧚🏻
Selon Pitchbook, les fondatrices de startups ont récupéré 28% des encours levés aux Etats-Unis en 2023, et les chèques leur ont été faits par des VC féminisés à 17%. En Europe, c’était respectivement 21% et 15%. En progrès, peut mieux faire.
Combien de semaines dans une année ? Perplexity.ai s’embrouille les pinceaux, dans cet article qui tente de départager une recherche Google et les logiciels d’intelligence artificielle. ”It’s going to take a lot more than a chatbot to kill Google.”
Amazon Go, l’opérateur des boutiques sans caisse, fait une croix sur le Just Walk Out, qui permettait à ses utilisateurs de prendre leurs produits et de sortir directement du magasin. En fait de high tech, la surveillance des clients était faite via les caméras par des milliers d’employés derrière leurs écrans en Inde.
Une autre IA avec ce clip du Slip Français, au cas où vous y auriez échappé cette semaine. Ils baissent leurs prix mais doivent atteindre 400 000 unités. Lien non sponsorisé, assorti d’une commande. 👼
Who’s got the A(ctivist) ?
En janvier 2023, quelques mois après le retour de Bob Iger à la tête de Disney, l’activiste Trian Partners demande que son représentant, Nelson Peltz, soit nommé au conseil d’administration, jugeant que la performance du titre provient d’une gouvernance, d’une stratégie et d’une allocation du capital défaillantes, critiques pas totalement dénuées de fondement. Après une période d’apaisement, les hostilités reprennent et Trian soumet en décembre dernier au vote des actionnaires la nomination de deux administrateurs, Peltz et un ancien CFO de Disney. Cette semaine, les 12 administrateurs proposés par Iger ont été confortablement élus (à 94% dit-on) après une campagne de communication à 40 M$, pendant laquelle Elon Musk avait déclaré qu’il ne détenait pas d’actions Disney mais en achèterait si Peltz était élu au conseil d’administration.
Selon la revue annuelle de l’activisme établie par Lazard, les nouvelles campagnes d’activisme, au nombre de 252 dans le monde en 2023, ont fortement augmenté en Europe et en Asie-Pacifique. Le Nasdaq, qui utilise une définition plus large, dénombrait plus de 800 actions en cours dans sa dernière édition (2022). Les activistes sont des actionnaires qui rendent leurs positions, longues ou à découvert, publiques. Les longs agissent comme des actionnaires de capital-investissement, en achetant quelques pourcents du capital et essayant d’influer sur la stratégie. Les activistes short-sellers établissent une position à découvert avant de rendre publique leur analyse négative de la société. Souvent vilipendés, ils sont appréciés des régulateurs, à qui ils servent de whistleblowers, même si l’on déplore une augmentation des cas de « short and distort » apparentés à de la manipulation de cours. Ils prennent des risques légaux, de réputation et financiers : la vente à découvert de Tesla a coûté 38 Md$ aux « shorts » en 2020, un record.
Quelle est leur performance ? Je n’ai pas trouvé de données consolidées sur longue période, mais elles sont par nature publiques, et certains, dont Hindenburg Research, publient leur trackrecord. Dans une étude de l’UCL, on trouve une mesure de la performance des hedge funds activistes longs de 2009 à 2016. Elle est supérieure à celle des hedge funds dans leur ensemble, mais inférieure à celle du marché. Celle d’activistes shorts suivis entre 2010 et 2020 conclut à une surperformance de 15% en un peu plus de 4 mois. L’ETF LeaderShares Activist Leaders n’a qu’un peu plus de 3 ans d’historique, et des encours relativement modestes.
Pour en revenir à notre préambule, cet article fournit un résumé captivant de la relation entre les deux Bob, Iger et Chapek « Who ‘s got the A(ccountability) », éclairant les raisons qui poussent les activistes à s’intéresser à Disney.
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Cet article ne constitue pas une recommandation d’investissement sur les thèmes ou les titres mentionnés.