Le S&P500 dépasse les 5000 points et l’Eurostoxx prend un peu plus d’1% dans une semaine relativement pauvre en données macro mais toujours portée par les résultats des sociétés, technologiques notamment. Peu après la COP 28, et avant les potentiels changements consécutifs aux élections américaines, retour sur la contre-performance de la plupart des sous-secteurs de la cleantech.

Macro 🌡️

Aux Etats-Unis, l’ISM des services surprend à la hausse et s’installe solidement au-dessus de 50, et la composante prix payés, indicateur avancé de l’inflation, augmente fortement, de même que les nouvelles commandes et l’emploi. Les nouvelles demandes d’allocations chômage sont un peu inférieures aux attentes à 218 000. Jerome Powell déclare qu’il est temps d’avoir une conversation d’adultes sur la dette.

En Allemagne, les commandes à l’industrie s’offrent un rebond surprise, à +8,9% alors qu’elles étaient stables le mois précédent. Les prix à la consommation sont en hausse de 2,9% (3,7% en décembre). L’Europe a échappé à la récession au deuxième semestre 2023, affichant 0% de croissance au quatrième trimestre après -0,1% au troisième.

Selon l’OCDE, la croissance mondiale devrait s’établir à 2,9% en 2024, contre 3,1% en 2023. Pour la zone € comme pour la France, ce serait 0,6%, pour les Etats-Unis 2,1%. Quant au FMI, il relève ses estimations, attendant 3,1% de croissance pour l’économie mondiale (2,1% pour les Etats-Unis, 1% pour la France). Si l’on en croit l’estimation de cette semaine de la Fed d’Atlanta, dont les marchés étudient pour une raison obscure le GDPNow, les US devraient afficher 3,4% de croissance au premier trimestre (plus ou moins 1,5% sur la base du trackrecord qu’ils ont l’honnêteté de publier).

Le marché chinois rebondit parce que la presse rapporte que le régulateur des marchés, la CSRC, doit briefer Jinping sur les moyens de faire rebondir la bourse, juste après l’annonce d’une interdiction des ventes à découvert et d’un nouvel investissement d’un fonds souverain (Central Huijin Investment Ltd, division de China Investment Corp) dans les ETF. Dead cat bounce. Et pas de nouvelles du briefing, juste l’annonce du remplacement du président de la CSRC par le vétéran Wu King, surnommé le broker butcher. Sinon, les prix à la consommation baissent de 0,8% en janvier, la plus forte baisse depuis 2009.

Selon Starwood Capital Group, qui gère 115 Md$ dans l’immobilier mondial, la hausse des taux a déjà engendré 1 000 Md$ de baisse des valorisations pour le seul segment de l’immobilier commercial dans le monde, et ce alors que le très faible nombre de transactions (un plus-bas de 10 ans) rend difficile la réévaluation des actifs. Les groupes chinois (ou leurs administrateurs judiciaires), vendeurs forcés de leur immobilier à l’étranger, se font plus présents. Quant aux particuliers européens, ils retirent 1 Md€ par mois des fonds immobiliers, qui pourraient devoir vendre leurs actifs pour faire face aux rachats.

Les ETF bitcoin enregistrent depuis cette semaine des flux nets positifs (auparavant les entrées dans les fonds spot compensaient à peine les sorties du fonds Grayscale), et le bitcoin prend environ 10% sur la semaine.

Et pour ceux que l’impact potentiel de l’intelligence artificielle sur le monde inquiète, Nouriel Roubini (ex membre du FMI, ex-conseiller économique de Clinton) fait preuve d’une forme d’optimisme en  évoquant le trackrecord de Davos et autres sommets d’intelligence humaine.

Micro  🏢

Selon Factset, pour les 65% du S&P500 ayant publié leurs résultats, la croissance de BPA s’établit à 1% sur un chiffre d’affaires en hausse de 4%.

Le fabricant de semiconducteurs (pour l’électronique grand public, l’internet des objets, l’automobile et les infrastructures numériques) Arm Holdings prend 48% en annonçant des résultats et des objectifs très supérieurs aux attentes des analystes (d’environ 40% pour le BPA du prochain trimestre). Une touche d’exubérance irrationnelle, à 43x le chiffre d’affaires ? Et aussi un flottant très réduit et passablement shorté.

Le marché salue le retour des bons résultats chez Disney après un long passage à vide et l’investissement de 1,5Md$ dans Epic Games, le créateur de Fortnite.

Snap baisse de 35% sur la publication d’un chiffre d’affaires trimestriel en hausse de 5% et l’annonce de pertes plus élevées que prévu au T1. Snapchat a 414 millions d’utilisateurs actifs quotidiens au quatrième trimestre, en hausse de 10%, et plus de 800 millions d’utilisateurs mensuels, mais peine à monétiser.

Pour Pinterest aussi la séance de publication est compliquée (28% de baisse avant l’ouverture) : 498 millions d’utilisateurs actifs mensuels, chiffre d’affaires en hausse de 12% et résultat net positif au T4, mais les objectifs pour le premier trimestre sont jugés décevants.

Démontrant une fois de plus les facultés d’anticipation des agences de notation, Moody’s dégrade la notation de crédit de New York Community Bancorp (en baisse de quelque 60% depuis sa publication) à junk.  

Chiffre d’affaires en hausse de 28%, marge brute de 80,9%, le sweet spot d’un cycle dans l’industrie pharmaceutique, en l’occurrence le quatrième trimestre publié cette semaine par Eli Lilly, dont les résultats sont tirés notamment (mais pas seulement) par ses traitements de l’obésité.

Novo Holdings achète le sous-traitant pharmaceutique Catalent pour 16,5 Md$, et revend à Novo Nordisk certains sites de production pour 11 Md$. Ces sites devraient permettre à Novo de produire ses médicaments anti-obésité dans des quantités plus en rapport avec la demande. Le boss de Novo déclare par ailleurs recevoir des appels des dirigeants de l’industrie alimentaire, effrayé par l’impact du produit sur leurs ventes.

Le transporteur maritime danois Maersk suspend son rachat d’actions en raison des perturbations dans la mer Rouge, et alerte de nouveau sur les surcapacités de son industrie (augmentation prévue de 12 à 13% de la flotte globale).

Adam Neumann, fondateur de WeWork et seul actionnaire à avoir gagné quelque chose (quelques centaines de millions quand même, contre environ 22 Md$ de pertes pour Softbank, Blackrock, Goldman Sachs et al), s’offusque que la société ne s’empresse pas de répondre à son offre de la reprendre à la barre du tribunal de commerce. Valorisée 47Md$ au plus-haut, WeWork a déposé le bilan en novembre dernier. No limit. 

Sam Altman, le CEO d’OpenAI, chercherait à lever 5 à 7 000 Md$ (vous avez bien lu), auprès des UAE notamment, pour construire l’infrastructure (semiconducteurs, datacenters, énergie) nécessaire au développement de l’IA.

Kering rebondit malgré des résultats très moyens (ventes en baisse de 4% chez Gucci, résultat opérationnel du groupe à -15% sur l’ensemble de 2023). Hermès enregistre 17,5% de croissance de chiffre d’affaires au quatrième trimestre (à changes constants), et envisage des hausses de prix de 8 à 9% en 2024. Selon Bain, la croissance de l’industrie devrait être divisée par 2 en 2024, à 4%. 

HSBC s’attaque aux fintechs en proposant un service de paiements internationaux à prix attractifs comme ceux de Wise ou Revolut, nommé Zing.

Panne d’énergie 🍃

Alors que l’issue des élections américaines est de plus en plus certaine, les paris sur les gagnants et perdants en bourse commencent. Attention, c’est parfois contre-intuitif. Bloomberg note que l’élection de Trump avait signé le début de la dégringolade du cours de Smith & Wesson, tandis que celle de Biden, malgré la mise en place de l’Inflation Reduction Act et de son volet de subventions aux renouvelables, coïncidait à quelques semaines près avec le pic des fonds verts. Effectivement, l’indice NASDAQ Clean Edge Green Energy a fait un plus-haut en décembre 2020, pour baisser de près de 3% l’année suivante, de 30% en 2022, et de 10% en 2023.

Lors de la COP 28, une alliance a été signée par 20 pays en vue de tripler la capacité d’énergie nucléaire dans le monde d’ici 2050, tandis que les EAU, Blackrock, Brookfield et TPG annonçaient le lancement d’un fonds climat de 30 Md$. A mettre en regard des 1750 Md$ investis dans la transition énergétique en 2023 (une fois et demie les investissements dans les énergies fossiles), les principaux postes étant les énergies renouvelables, l’efficience énergétique et les réseaux. Et des 4550 Md$ d’investissements nécessaires entre 2023 et 2030 selon BloombergNEF.

Un thème d’avenir, donc, à bien des égards, mais sur lequel Investir n’est pas une sinécure, entre choix de la technologie, business models parfois distordus par les subventions, efficacité réelle (voir l’Energy Return on Investment et le coût des surestimations de production des fermes éoliennes) et impact, de l’emprise au sol notamment, sur les écosystèmes. Il faudra plus de quelques centaines de mots, donc des papiers dédiés à chacun des sous-secteurs, pour faire le tour du sujet. Reste que le secteur est volatile, et plutôt mal orienté ces derniers temps : sur un an, la performance de l’indice MAC Global Solar Energy est en baisse de 40% (nous avions évoqué le sujet dans ce numéro), celle du ISE Clean Edge Global Wind Energy de 16%, celle de l’ETF Global X Hydrogen de 37%, tandis que le principal ETF sur l’uranium inverse la tendance avec plus de 45% de hausse. Et que l’issue des élections américaines fait peser un risque sur la performance des prochains mois.

Et pour ceux qui préfèrent le nucléaire aux éoliennes (pour lesquelles les logiciels de création d’images par IA ont une nette préférence), les véhicules d’investissement ne sont pas légion mais quelques solutions plus diversifiées que l’uranium existent.  

Cet article ne constitue pas une recommandation d’investissement sur les thèmes ou les titres mentionnés. Si vous êtes intéressés par des thèmes d’investissement, contactez-nous.