Made in Silicon Valley

Macro

🌩️ Ebranlés par les discours hawkish des banquiers centraux des deux côtés de l’Atlantique, les marchés ont dû encaisser en fin de semaine les déboires de Silvergate et surtout de SVB Financials.

Les officiels de la Fed et de la BCE indiquent que l’inflation justifie la poursuite des hausses de taux. Jerome Powell, intervenant au Sénat, évoque une accélération des hausses de taux ou un niveau final plus élevé afin de juguler l’inflation. Le marché attend désormais 1% de hausse supplémentaire, pour un taux terminal à 5,6%. Il y a eu 242 000 créations d’emploi dans le secteur privé en février. Seules les petites entreprises continuent à supprimer des emplois pour le septième mois d’affilée. Les nouvelles demandes d’allocation chômage dépassent 200 000 pour la première fois depuis janvier, mais le rapport sur l’emploi est rassurant, même si le taux de chômage ressort un peu au-dessus des attentes à 3,6%.

Les ventes au détail en zone euro ont baissé de 2,3% en janvier (par rapport à janvier 2022). La dernière lecture du PIB du 4èmetrimestre montre une croissance nulle (elle était de 0,1% dans la lecture initiale).

L’assemblée Populaire nationale chinoise fixe l’objectif de croissance 2023 à 5% environ, le niveau le plus bas depuis plus de 30 ans.

Micro

Le cours du constructeur de véhicules électriques Rivian atteint un plus-bas historique après l’annonce de l’émission d’1,3Md$ en obligations convertibles, qui intervient après un nouveau rappel de milliers de véhicules et des résultats décevants.

Meta envisage de nouvelles suppressions d’emplois qui pourraient être du même ordre que celles de l’année dernière (11 000 personnes).

Lors de la CERAweek, la conférence la plus importante sur l’énergie, les interventions ont beaucoup tourné autour de l’indépendance énergétique, revenue au premier plan depuis l’invasion de l’Ukraine. Si la nécessité de réduire l’empreinte carbone du secteur n’est pas oubliée, les intentions d’investissement dans l’extraction de combustibles fossiles reprennent.

Docusign n’est plus dans le rouge, mais les résultats du quatrième trimestre déçoivent les investisseurs et la société annonce le départ de son directeur financier.

Le dépôt d’un projet de loi visant à restreindre l’usage de certaines technologies de télécommunication posant un risque pour la sécurité nationale américaine (Tik Tok en l’occurrence) fait remonter le cours de Snap. L’application Tik Tok, d’origine américaine mais rachetée par le Chinois Byte Dance en 2017,est sous surveillance depuis qu’il est acquis qu’elle envoie les données de ses utilisateurs à sa maison-mère.

Poxel prend 24% sur la publication des résultats de phase 2 de son traitement de la NASH ou stéatose hépatique non alcoolique, maladie associée au syndrome métabolique et caractérisée par l’accumulation de graisse dans le foie.

Euroapi, l’ex-filiale de Sanofi dédiée à la production de principes actifs pour les médicaments, perd 21% sur la publication d’un chiffre d’affaires et de marges inférieurs aux objectifs, et de prévisions 2023 décevantes.

S’il vous semble que le prix de vos vacances augmente, vous avez raison. Les marges brutes des sociétés de consommation discrétionnaire cotées en Europe ont augmenté de 2,8 points entre 2021 et 2022. Pour la technologie, c’est 2,6, les communications 1,9 et la consommation stable 1,1. L’inflation profiterait plus aux entreprises qu’aux salariés et aux clients?

Selon Crédit Suisse, les actions américaines font deux fois mieux que les actions françaises depuis 1900.

La consommation en Chine repart rapidement, avec par exemple une croissance de 30% du chiffre d’affaires des restaurateurs en février, et de 17% des vols domestiques. JD.com, le géant de l’e-commerce, perd néanmoins 11% en raison d’une déception sur ses ventes. Le retour du commerce physique, en Chine aussi.

Made in Silicon Valley

Rude semaine pour les banques. Tout d’abord, Silvergate décide de liquider sa filiale crypto, et perd 42% sur l’annonce. Pas complètement une surprise, et pas de risque systémique. Puis c’est SVB Financials, la maison-mère de Silicon Valley Bank, qui dévisse (de 60% dans un premier temps) sur l’annonce d’une augmentation de capital de 2,25Md$ destinée à renforcer ses fonds propres, entraînant tout le secteur bancaire avec elle.

Fondée en 1983, SVB Financials est la première banque de la Silicon Valley et la seizième banque américaine. Elle compte parmi ses clients près de la moitié des start ups financées par des fonds de capital risque et a réalisé 44% de leurs introductions en bourse santé et tech en 2022. Comme toutes les banques, elle rémunère les actifs déposés par ses clients, à des taux qui ont dû suivre la hausse des taux directeurs, et ces actifs sont investis en obligations gouvernementales. Sans risque donc, sauf si celles-ci baissent en raison de la hausse des taux et que la banque est obligée de les vendre avant leur échéance. Exactement ce qui s’est produit : les start ups, dont la banque notait qu’elles n’avaient pas diminué leur consommation de trésorerie (cash burn) malgré la raréfaction des financements, ont graduellement retiré leurs avoirs, le mouvement s’accélérant lorsque des doutes ont émergé sur la solvabilité de SVB. Pour les rembourser, la banque a dû liquider ses investissements à hauteur de 21Md$, engrangeant au passage une perte de 1,8Md$ et une aggravation de la crise de confiance, les grands fonds demandant à leurs participations de retirer leurs dépôts.

Vendredi, la FDIC, l’organe de garantie des dépôts bancaires, a mis la banque sous séquestre. Elle remboursera lundi les clients à hauteur de la garantie fédérale de 250 000$. Pour le solde (la banque détenait au 28 février 334Md$ pour le compte de ses clients), tout dépendra de l’avenir, i.e. essentiellement d’une éventuelle cession des actifs à une autre banque. SVB Financials avait traversé l’éclatement de la bulle internet et la crise de 2008 sans encombre (relativement à ses pairs). La hausse des taux aura eu raison d’elle, et elle ne sera certainement pas la seule. D’autres banques régionales ont averti cette semaine que leurs résultats seraient affectés par la hausse du coût des dépôts (le taux d’intérêt servi sur les sommes déposées par les clients augmente avec la hausse des taux directeurs), néanmoins elles sont probablement peu nombreuses à avoir géré aussi agressivement leur bilan que SVB. Quant aux répercussions sur les start ups et les fonds, elles risquent d’être plus notables. Rappelant peut-être que le monde des actifs cotés, loin d’être parfait, est néanmoins plus transparent et mieux régulé que celui du non coté.