Peut-on parier sur une relance de la consommation chinoise?

Les résultats de Broadcom et la quasi-certitude d’une nouvelle baisse des taux de la Fed la semaine prochaine permettent aux marchés de terminer proches de l’équilibre après un début de semaine sous le signe de la nervosité.

Peut-on parier sur une relance de la consommation chinoise ?

Macro 🔭

 

Aux Etats-Unis, les dirigeants de PME sont rassurés par les élections : l’indice NFIB retrouve son niveau le plus élevé depuis juin 2021. L’indice des prix à la consommation augmente de 2,7% (annualisé), en légère accélération sur octobre, toujours en raison des services. Etant donné que les inscriptions au chômage remontent à 242 000, une baisse de taux de 0,25% de la Fed la semaine prochaine reste le scénario central (le marché lui affecte une probabilité de 95%). L’équipe de transition de Trump étudie la consolidation, voire l’élimination, de certains régulateurs bancaires, ce qui ne pourrait se faire sans l’accord du Congrès.

La confiance des investisseurs de la zone € (Sentix) baisse encore. La BCE baisse les taux de 25 points de base et pourrait en faire autant lors des réunions de janvier et mars.

La banque centrale du Brésil surprend avec une hausse de 1% de son taux directeur à 12,25% et en promet deux du même montant lors des prochaines réunions, dans un contexte de hausse des anticipations d’inflation. Cela ne suffit pas à enrayer la baisse du real.

La Banque nationale suisse surprend également avec une baisse de taux deux fois plus importante que prévu (0,5%).

En Chine, la tendance déflationniste s’installe, avec la plus faible hausse des prix à la consommation depuis 5 mois (+ 0,2%), tandis que les prix à la production baissent pour le 26ème mois d’affilée. La croissance des prêts bancaires déçoit, et les exportations ralentissent (+6,7% en novembre, +12,7% le mois précédent), malgré un plus-haut depuis septembre 2022 pour les exportations vers les Etats-Unis, en anticipation des nouvelles taxes. Le Politburo évoque de nouvelles mesures de relance (cf dernier paragraphe).  

Au Japon, le PIB du troisième trimestre est révisé à la hausse. Les enquêtes sur l‘activité (Economy Watchers et Tankan) montrent une nette amélioration.

L’OPEP coupe ses estimations pour la demande de pétrole en 2024 et 2025 pour le cinquième mois d’affilée. La demande a été révisée à la baisse d’environ un quart depuis juillet.

Micro 🔬

Les flux vers les ETF dépassent 1000 Md$ pour la première fois en 2024.

Les régulateurs chinois ouvrent une enquête pour déterminer si Nvidia enfreint les lois anti-trust. La Chine représentait 15% du chiffre d’affaires de la société au dernier trimestre.

Les actionnaires de Microsoft refusent que la société investisse sa trésorerie en bitcoins, suivant l’avis du conseil d’administration, malgré la présentation très enthousiaste que Michael Saylor, le patron de MicroStrategy, leur a transmise. Bien essayé. Il a fait la même suggestion à Amazon, dont les actionnaires demandent au conseil d’administration d’étudier le sujet. Un pas en arrière dans l’institutionnalisation du bitcoin, un pas en avant également cette semaine puisque BlackRock déclare qu’allouer 1 à 2% à la crypto dans un portefeuille multi-actifs est raisonnable (détails ici). Cet éditorial de Bloomberg va plutôt dans le sens de Microsoft, et s’insurge contre l’idée qu’un projet anarchiste finisse, grâce à un lobbying bien mené, par faire du contribuable américain le dernier d’une pyramide de Ponzi.

Par ailleurs, Microsoft enregistrera une dépréciation de 800 M$ sur son investissement dans Cruise, la startup de conduite autonome détenue à majorité par General Motors, qui annonce la fermer en raison des coûts de développement et d’acquisition d’une flotte, et de la compétition accrue. Après les retraits, d’Uber, Lyft et selon toute probabilité Apple, il ne reste pourtant plus dans la course que Waymo (Alphabet), Tesla, Zoox (Amazon), et en Chine Apollo Go (Baidu).

Alphabet demande à la FTC de mettre fin à l’accord d’exclusivité de Microsoft avec OpenAi.

Les marchés pénalisent Adobe, dont les prévisions de chiffre d’affaires pour l’année (à fin novembre 2025) sont un peu inférieures au consensus. Le titre affiche une performance très décevante cette année en raison de craintes des investisseurs sur l’impact de la concurrence de certains outils d’intelligence artificielle, dont ceux d’OpenAi, sur les ventes du logiciel créatif.

Le fabricant de semiconducteurs Broadcom prend 24% en séance et entraîne ses pairs et le marché avec lui sur la publication de prévisions de croissance très élevées dans l’IA : 65% de croissance attendue au prochain trimestre (à fin janvier) pour ses puces IA, à rapporter aux 10% de croissance attendus pour l’ensemble de ses ventes. Il évalue de plus son marché (composants IA pour les datacenters) dans une fourchette comprise entre 60 et 90 Md$ en 2027.

Le distributeur Walgreens ferait l’objet d’une offre d’un acteur du private equity. Le titre affichait avant la rumeur la pire performance du S&P 500.

Finalement c’est Biden qui s’apprêterait à bloquer la vente de US Steel au Japonais Nippon Steel, ratant l’occasion de constituer le troisième aciériste mondial derrière le Chinois Baowy Steel et ArcelorMittal. Le rapport sur les risques de l’opération pour la sécurité intérieure doit être remis dans moins de deux semaines.

Omnicom et Interpublic, respectivement troisième et quatrième mondial de la publicité, annoncent leur fusion. Omnicom offre 13,25 Md$ en titres pour son rival. Le groupe deviendrait le premier du secteur devant WPP et Publicis.

 

Stellantis et le chinois CATL s’allient pour investir 4,1 Md€ dans la construction d’une usine de batteries pour véhicules électriques en Espagne, alors que 11 des 16 projets européens dans le domaine ont été décalés ou annulés.

La minute innovation 🧚🏻

Google lance le premier modèle de la famille Gemini 2.0, une version améliorée de son LLM.

Willow, la puce quantique d’Alphabet résout en cinq minutes un problème qui prendrait aux superordinateurs actuels 10 septillions d’année (1025). Reste à trouver des cas d’usage.

L’IA de génération de vidéos Sora est désormais disponible pour les abonnés Chat GPT Plus et Pro.

Lanterne rouge  🏮

Nous avions déjà évoqué la Chine ici. Cette semaine, le Politburo annonce vouloir stimuler la croissance par un « desserrement modéré » de la politique monétaire (le premier depuis quatorze ans), une politique budgétaire plus proactive, et des mesures contracycliques « extraordinaires ». Le soutien à la consommation « vigoureux » passerait par des aides pour le budget des foyers à revenus faibles et moyens, l’encouragement à la dépense, l’augmentation des retraites et du remboursement des dépenses de santé, deux préalables pour convaincre les ménages d’épargner moins (la Chine épargne à hauteur de plus de 40% de son PIB et détient 28% de l’épargne mondiale, alors que les Etats-Unis et l’Europe réunis en détiennent 33%).

La réaction des marchés (Chine continentale et Hong Kong) a été mitigée, le CSI 300 clôturant la journée de vendredi et la semaine en baisse après deux semaines de rebond, car le plan manque une fois encore de détails. Ils seront probablement communiqués en mars, lors de la session législative qui fixe l’objectif de croissance et le budget, et qui aura permis d’apprendre quelle sera véritablement l’attitude de Trump sur les importations chinoises. Les économistes anticipent des baisses de taux en 2025 et un objectif de déficit qui passerait à 4% au lieu des 3% habituels. Surtout, il semble que les déclarations de cette semaine laissent anticiper la transition tant attendue de l’économie chinoise de la production à la consommation interne. Rien ne garantit que la relance ne soit effective, ni efficace, mais il s’agit d’un pas dans la bonne direction.

L’enjeu, loin d’être négligeable, pour la Chine et pour le monde, est illustré ici : les Etats-Unis comptent environ 330 millions d’habitants, avec un PIB par tête de 62 000$, et une part de la consommation dans le PIB de 70%. La Chine compte 1,4 milliards d’habitants, avec un PIB par tête de 14 000$ (le graphe date de 2019, on est désormais à 22 000$), et une part de la consommation dans le PIB de 38%. La Chine peut échouer dans sa transition, comme le Japon à la fin des années 80, et la volatilité restera de mise pour quelque temps encore, mais c’est certainement l’un des paris majeurs de 2025.

Cet article ne constitue pas une recommandation d’investissement sur les thèmes ou les titres mentionnés.