La distance qui nous sépare de la vertu

Evolution des indices à la clôture de jeudi          

                    depuis une semaine      depuis le début de l’année        

CAC 40                    -4%                                   -21%   

S&P500                   -3%                                   -26%   

Dow Jones              -3%                                    -9%  

Nasdaq                    -3%                                   -25%    

La macro

Aux Etats-Unis, l’indice de confiance du consommateur du Conference Board est en hausse comme le mois dernier, porté par l’emploi, les salaires et la baisse du prix de l’essence. Pas si rose quand on regarde les résultats des sociétés, cf sujet central. L’indice des prix des maisons S&P Case Shiller pour juillet ralentit fortement à +15.8% annualisé (quand même). C’est le ralentissement le plus marqué depuis que l’indice existe. Les demandes d’allocations chômage hebdomadaires (première estimation) tombent au plus bas depuis avril, à 193000. Pour mémoire, pendant la décennie précédant la pandémie, elles étaient en moyenne de 306000.

L’indice IFO du climat des affaires en Allemagne baisse de plus de 4 points par rapport au mois d’août. En France, la confiance du consommateur baisse après son (petit) rebond d’août et revient sur des plus-bas de 20 ans. L’inflation dans la zone € ressort à 10%, supérieure aux attentes.

La BoE annonce un programme de rachat de titres de 65Md£ jusqu’au 14 octobre. Une mesure d’urgence pour calmer le marché obligataire après l’annonce du package fiscal de Liz Truss. Les futurs retraités peuvent souffler, pour un tout petit moment.

A contrario des mesures britanniques, qui comportent notamment une suppression de la tranche supérieure de l’impôt sur le revenu, l’Espagne envisage une taxe sur les patrimoines supérieurs à 3M€. #taxtherich

L’OCDE anticipe une croissance de 2.2% de l’économie mondiale en 2023. La plupart des pays d’Europe afficheront au mieux une croissance faible, et le PIB allemand est attendu en baisse de 0,7%. Aux Etats-Unis, ce serait 0,5%.

Fed et BCE s’expriment pour réitérer la priorité aux hausses de taux sur la croissance économique.

Les sociétés

Plus des deux tiers des répondants à un sondage Bloomberg s’attendent à ce que les résultats des valeurs technologiques déçoivent en raison de l’inflation et de la vigueur du $.

Biogen finalise le paiement de 900M$ pour des pots-de-vin versés aux médecins et annonce la même semaine des résultats positifs pour son potentiel traitement de l’Alzheimer, lecanumab. Celui-ci diminuerait le déclin cognitif de 27%, sans pour autant atteindre le score considéré comme cliniquement pertinent par les autorités de santé. Détails le 29 novembre au congrès CTAD. La société commercialise déjà (difficilement) aducanumab sous la marque Aduhelm, au prix de 56000$ par an et malgré des résultats cliniques douteux. La fourchette de prix envisagée pour lecanumab est de 9249-35605$. 

CarMax, le distributeur de voitures d’occasion, chute de 25% sur des résultats trimestriels très inférieurs aux attentes, avec des volumes en baisse de 10,3%. La société attribue sa performance aux pressions inflationnistes, à la hausse des taux et à une confiance du consommateur dégradée. Le prix des voitures d’occasion s’infléchit depuis quelques mois, après une hausse de plus de 30% en 2021.

Apple aurait demandé à ses fournisseurs de baisser la production de l’iPhone 14 de 6 millions d’unités au deuxième semestre. La demande pour les produits électroniques est en baisse. En revanche, le 14 Pro, plus cher, se vendrait mieux. 

Les résultats de Nike déçoivent : croissance des ventes raisonnable mais explosion des stocks qui pèsent sur la marge brute.

Débuts timides en bourse de Porsche après une introduction dans le haut de la fourchette de prix à 82,5€ par action (75Md€ de capitalisation boursière). Pour Leapmotor, le fabricant de véhicules électriques chinois, c’est plus chaotique : -33% lors de la première cotation à Hong Kong. Pas bon pour l’ISR (voir ci-dessous). Ou justice immanente ? Toujours chez les constructeurs automobiles, le Chinois Geely, propriétaire ou actionnaire de nombreuses marques dont Lotus ou Volvo, prend une participation de 7,6% dans Aston Martin.

Onepoint et le fonds d’investissement ICG feraient une offre sur les activités les plus prometteuses d’Atos.

La distance qui nous sépare de la vertu

L’ISR, ou investissement socialement responsable, a pour objectif de concilier performance financière et développement durable en appliquant une sélection sur des critères ESG (environnementaux, sociaux et de bonne gouvernance). Cette approche se généralise dans la finance, avec plus ou moins de succès tant la définition et le calcul des scores sur ces dimensions est difficile. Côté clients, le dernier sondage conduit pour le Forum pour l’Investissement Responsable met en évidence que 63% des Français n’ont jamais entendu parler de l’ISR, et que s’ils sont majoritairement favorables à l’approche durable, seuls 22% y investiraient une partie de leur épargne et seulement 32% estiment que les produits responsables ont un impact positif sur l’environnement et la société.

Aux Etats-Unis, où amour de la vertu et appât du gain se livrent un âpre combat, démocrates et républicains (schématiquement) s’affrontent sur le sujet ESG. CalPERS, le fonds de pension des fonctionnaires californiens, est très en pointe sur l’ESG depuis longtemps, tandis que le contrôleur financier du Texas a sommé les fonds de pension de l’Etat de sortir de 10 institutions financières et 348 fonds d’investissement (de BNP au leader mondial Blackrock) accusés de boycotter les producteurs d’énergie. 17 Etats américains ont mis en place des mesures similaires, souvent qualifiées d’anti-woke. Et un fonds activiste demande au dirigeant de Chevron d’avoir le courage de maximiser la valeur à long terme pour ses (petits) actionnaires. 

Difficile de trancher à ce stade sur l’impact de l’ISR sur la planète, la société et la performance financière. Les données sont aussi robustes que celles qui prouvent une corrélation entre préférence pour l’ESG et dépression saisonnière. Si si, certains se sont penchés sur le sujet. Elle viendrait d’une aversion au risque supérieure chez les gens déprimés, pas de la recherche d’une satisfaction altruiste, la vertu n’a pas encore gagné. Le fait d’acheter des fonds ESG n’est en revanche pas clairement identifié comme une source d’amélioration des symptômes, précisent les chercheurs, que nous aurons la charité de ne pas citer.